Le CONSEIL CONSTITUTIONNEL reste le rempart de l’État de droit

C’est un signe très inquiétant de notre époque à savoir que des hommes politiques puissants osent aujourd’hui mettre en cause nos institutions, les piliers de la démocratie, en s’attaquant au « gouvernement des juges » et en évoquant même une « aristocratie constitutionnelle ».
Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, pour le citer, a osé écrire récemment : « L’État de droit devient de plus en plus un cadre idéologique contraignant, plutôt qu’un cadre juridique… Il s’agit de revenir à la source du droit : la souveraineté populaire ».
En résumé, du Donald Trump dans le texte.
Cette dérive que nous connaissions pour appartenir à l’extrême droite a infiltré la droite LR dans une course folle à l’idée la plus saugrenue, la plus inutile et dangereuse.
Personne ne serait surpris si certains nous annonçaient la réouverture du bagne à Cayenne.
Cette façon de « surjouer » avec la loi, comme cela a déjà été fait par le passé avec la loi « asile immigration » est très dangereuse dans une grande démocratie.
Se moquer, comme Gabriel Attal l’a fait, des professionnels par ailleurs vent debout contre sa réforme, des parlementaires de gauche, des citoyennes et citoyens très inquiets en leur faisant croire que sa loi fera baisser la délinquance et en venant aujourd’hui s’en prendre au juge constitutionnel est la preuve d’une très grande immaturité politique et surtout que cet ancien jeune premier ministre n’a pas la carrure d’un homme d’État.
En disqualifiant publiquement une institution créée par Charles de Gaulle et Michel Debré en 1958 et dont le rôle consiste à réguler le fonctionnement des pouvoirs publics et à contrôler la conformité des lois à la Constitution, les élus de droite concernés portent atteinte à la démocratie et jouent avec le feu.
Ces apprentis sorciers, en jetant directement le discrédit à l’indépendance du Conseil constitutionnel, contribuent au désordre actuel et à l’absence de respect de l’autorité.
Qu’ils appliquent d’abord à eux-mêmes leurs leçons sur le respect de l’ordre, de l’autorité et de la fermeté, en respectant prioritairement toutes les institutions et la séparation des pouvoirs.
Cette proposition de loi Attal, sans avis préalable du Conseil d’État ni étude d’impact avait déjà été largement retoquée par la commission des lois au Sénat dans laquelle les « gauchistes » se révèlent pourtant fort discrets.
J’entends de-ci et de-là que l’on ne peut plus réformer notre pays, que les juges constitutionnels ont rendu une décision politique.
C’est faux !
Cette décision, très motivée juridiquement, s’appuie sur un « principe fondamental reconnu par les lois de la République » non inscrit dans la Constitution mais dégagé par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, ce que les juristes appellent le bloc de constitutionnalité, c’est-à-dire l’ensemble des normes de référence disposant d’un niveau égal à la Constitution de 1958.
Depuis des décennies, les « sages » rappellent que la justice des mineurs est soumise à un principe fondamental : la protection de l’enfant, des procédures judiciaires adaptées à leur âge et la primauté de l’éducatif sur le répressif.
Leur décision est donc conforme à l’ordonnance de 1945 telle qu’issue du Conseil national de la Résistance et sanctionne les dérives telles que la comparution immédiate, la suppression de l’atténuation de la responsabilité pénale, l’allongement de la détention provisoire, entre autres.
Pendant les débats parlementaires, nous avions insisté sur le caractère inconstitutionnel de ces mesures et le Conseil a fait droit à nos demandes de censure.
Cela va t’il calmer pour autant les ardeurs de certains ? Malheureusement je ne le crois pas.
Et c’est bien ce qui m’inquiète le plus.
Les derniers votes à l’Assemblée nationale montrent que nous sommes en pleine dérive populiste et que le trumpisme a bel et bien traversé l’océan.
Il faut que chacun comprenne à quel point notre démocratie est fragile et que le respect de l’État de droit est destiné à éviter un pouvoir arbitraire et à assurer l’égalité de tous les citoyens devant la loi.